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Les Neurosciences ont récemment révolutionné notre manière de visionner l’esprit et le cerveau. Grâce à la fonction de la Résonance Magnétique imagée (fMRI) nous pouvons à présent littéralement voir le cerveau au travail en temps réel tandis que différentes parties de celui-ci « s’allument »  répondant à une variété de stimuli internes et externes.  Les chercheurs à présent comprennent mieux, non seulement comment nous pensons à certaines choses mais aussi comment nous les ressentons. Des émotions de toutes sortes comme --  empathie, bonheur, mélancolie, colère, frustration, joie – sont toutes aperçues en tant qu’activité unique du cerveau dans des parties particulières de celui-ci.

 

 

 Les recherches nous font aussi remarquer  une différence souvent assez importante entre les individus pour autant que le degré de ces parties spécifiques du cerveau soit activé par des émotions déterminées.

 Certaines personnes ont une grande partie du cerveau vouée par exemple à la colère tandis que d’autres peuvent avoir un  développement plus important du cerveau dans la partie de l’empathie, ( il est dit que l’empathie est un résultat direct de la présence du moteur neurone dans le cerveau.) Les études fMRI sur des méditants ont également révélé une augmentation distincte d’activité dans les parties du cerveau qui correspondent à l’attention.

 

 

 

 

Un tas de questions peuvent se poser au sujet de tant de nouvelles données scientifiques comme ayant rapport au Zen ou même en fait, à n’importe quelle pratique spirituelle. La conscience serait-elle rien de moins qu’une collection de peloton de neurones ? L’attention serait-elle quelque chose qui peut être assemblé avec tant de dendrite, de neurotransmetteurs et ainsi de suite? Y a t’il une raison de s’engager dans  une discipline spirituelle difficile si nous ne sommes pas plus qu’un composé de parties constituantes ? N’y a t’il rien d’autre au- delà ?  La science semble être toujours en conflit avec la religion. Les gens d’un côté insistent à ce que la spiritualité et la science sont incompatibles et d’un autre côté suggèrent que le Satori, l’illumination, le Samadhi, l’Union Divine etc..  ne sont que des termes employés pour les états d’attention rencontrés dans l’expérience de notre voyage spirituel; qu’ils ne reflètent que simplement des états spécifiques du cerveau au lieu d’illuminer certains aspects fondamentaux de la réalité. La réalité est-elle seulement un « état d’esprit » ou la réalité existe-elle indépendamment de l’esprit? Cette question a tenu les philosophes en haleine pendant des siècles et il semble qu’il en sera ainsi pendant les siècles à venir. Mais regardons ces questions sous un point de vue mystique. En tant qu’étudiant physicien licencié il y a des années, je me rappelle avoir travaillé à la solution d’un problème particulier de la  ‘théorie des quantas’ qui m’avait coincé pendant des semaines. Je pensais au problème jour et nuit passant des heures à ma table de travail, papier et crayon à la main essayant  tous les jours de trouver la solution. Mais plus je travaillais et plus il semblait que je m’éloignais de la réponse. Je me retrouvais épuisé à l’extrême à force de vouloir comprendre au point même de sauter les repas et de manquer de sommeil. Alors une nuit, aux environs de trois heures du matin, je me réveillais entrevoyant un début de solution, je me levais d’un bond  réalisant avoir la réponse entière à mon problème. Tellement claire. J’allais à ma table de travail, me mis au travail et une paire d’heure après  j’avais la solution écrite complète et détaillée du problème devant moi. Ce qui était le plus intéressant dans cette histoire était, ‘comment’ cette solution m’était parvenue en tant que ‘totalement complète’. Ce n’était pas une partie … mais bien la totalité dénuée de mathématique. Ce ne fut qu’après  cette réalisation que  l’esprit mathématique se mit au travail et donna l’expression de ce qui était,  que déjà je connaissais mais pas-mathématiquement.     

Lorsque j’expliquai à mon conseiller de thèse ce qui s’était passé, il se mit à rire – d’un de ces bons rires qui lui est propre. Il était enchanté de ma petite épiphanie.

 

 Il me dit que ce genre d’expérience était une chose commune entre physiciens et continua me rappelant  plusieures grandes découvertes scientifiques réalisées de la même manière – la plus fameuse sans doute, celle du mathématicien Archimède, duquel il nous est rapporté l’éternelle et bien connue exclamation «  Euréka ! » ( L’histoire rapporte que tandis qu’il prenait un bain, il comprit spontanément la nature de l’insubmersibilité et que sur ce, il se mit à courir nu dans les rues de Syracuse en criant « Eurêka ! »  Qui signifie, j’ai trouvé. C’est ainsi que nous avons le Principe d’Archimède lequel, en terme simple dit essentiellement qu’un objet placé dans l’eau remplace en poids une quantité de cette eau égale au poids de l’objet. Le rapport de l’histoire vrai ou pas démontre néanmoins un aspect important du processus de la découverte que j’ai pu rencontrer personnellement.

 

Le fait de comprendre ne surgit pas d’une manière linéaire ou séquentielle- mais surgit d’une manière holistique : tout arrive en une fois. Le processus de la pensée se trouvant carrément sur la voie de la compréhension complète. Dans un sens, nous devons ‘défaire’ le ‘penser’ des choses pour pouvoir les comprendre mais en même temps les poursuivre avec une intensité même fébrile afin que celles-ci puissent se révéler à nous.  Mon « moment d’ eurêka ! » ne serait jamais arrivé si je n’avais pas appliqué une puissance de volonté acharnée en questionnant le sujet. Et ceci est également la clé du Zen: Le Zen n’est pas une activité passive mais exige un effort intense et même fébrile – un effort d’intérêt, un effort pour trouver une réponse, une solution.  Si cet effort est concentré sur la nature sous- jacente de notre vie --  sur le dessein du koan et de la pratique du hua tou – nous obtiendrons réponse (satori) ou encore, si l’effort est concentré sur quelque chose d’autre comme sur un phénomène physique – un dessein de la science -- nous en obtiendrons une autre  (ex. Comprendre comment flottent les bateaux)  Dans les deux cas, le processus de la découverte semble être le même – nous arrivons à comprendre par des  éclats soudains– et d’une manière totale. Nous voyons le tout avant d’en voir les parties. Dès que le tout est entrevu, l’esprit se met au travail pour découvrir les pièces qui le constituent … mais pouvons-nous dire alors que ces pièces sont  des manifestations de notre esprit – du processus de la pensée même ? Pour le participant qui veut comprendre quelque chose à ce ‘eurêka !’ C’est comme recevoir un cadeau du « grand au-delà » parce que ça n’a aucun sens de dire que nous faisons quoi que ce soit pour l’obtenir – il arrive… tout simplement. Nous sommes seulement les récepteurs.  Dans une entrevue avec D.T. Suzuki, Huston Smith lui avait demandé de bien vouloir commenter pourquoi selon lui, les occidentaux s’intéressaient tellement au Zen. Suzuki apparemment entrevoyait la science comme étant l’attraction de l’intérêt des gens pour la compréhension de la réalité mais sans issue pour ceux qui voudraient comprendre sa nature fondamentale intuitivement, car il répondit:  «  Bon, ce que je soupçonne c’est que l’occident s’est trop adonné à ce que nous appelons des études scientifiques. Les études scientifiques suivent un but défini. Tandis que la manière de penser de l’orient et de l’occident est juste l’opposé… Zen n’est pas, intellectuellement ou conceptuellement ou logiquement ou dialectiquement ou n’importe quel autre « ..ment », une chose à empoigner ni à saisir ( conclu t’il en riant) »  Les recherches scientifiques peuvent être aussi effectives qu’un outil d’entraînement comme un autre servant à nous préparer pour ce que nous appelons l’ « Esprit Zen » mais qui ne peut néanmoins pas nous amener plus loin. C’est comme compter les respirations lorsque nous nous asseyons tranquillement, ceci ne nous amènera seulement qu’au calme, à un état d’esprit concentré ; ou encore, ce sera comme se concentrer sur des voies de nature scientifique qui ne nous amèneront qu’aux découvertes de nature scientifiques. Dans les deux cas, nous nous concentrons sur un aspect du tout, pas sur le tout. Pour ceux qui ont des questions au sujet de la vie et de la mort, la science s’en tient seulement à des réponses intellectuelles. Se tourner vers une tradition mystique comme le Zen est naturel pour ceux qui recherchent des réponses non- dépendantes.   Certes que l’attention est dépendante de notre cerveau qui se sert des forces neurales nécessaires qui nous rattachent au monde qui nous entoure mais, ce qui différencie le Zen et les autres trajectoires mystiques, est que nous devenons attentifs de l’attention. Et dans ceci la science doit rester muette car la science n’est attentive que d’elle-même à cause de la construction limitée et du soi- référentiel de la nature du langage qu’elle emploie dans ses paradigmes scientifiques et mathématiques. Il n’y a que ‘l’attention même’ qui puisse devenir ‘attention du Soi’. L’attention n’a aucune propriété physique et ne peut ainsi être contenue ni conceptualisée par aucun modèle scientifique. Mon habilité d’avoir pu  percevoir dans un éclair soudain la réponse au problème provoquant de physique, a été une chose beaucoup plus significative pour moi que d’avoir pu être capable d’en écrire la réponse ( au fait, je ne me rappelle même plus ce problème de physique mais bien et vivement le moment de la découverte de l’eurêka !)

C’est facile d’oublier le rôle de la conscience surtout dans les sciences. Pourtant les quantas, la branche de la physique responsable pour nous avoir apporté la TV et les iPod, insiste sur la dépendance de la conscience de l’observateur: Le fait d’observer quelque chose affecte ce que nous observons. Simplement dit, notre propre attention altère le monde qui nous entoure. Ca n’existe pas un observateur passif. Fondamentalement, la physique moderne et le Zen sont en parfaite harmonie. Les deux voient la réalité comme étant un royaume de fluctuation, pulsant, d’énergie et que chaque ‘ peu ‘ chevauche chaque autre ‘ peu’.  En physique ceci est décrit par ce que nous appelons ‘ Fonctionnement d’onde’   – Tout a un Fonctionnement d’onde associé qui décrit sa nature probable dans le temps et l’espace. En tant qu’onde, elle est diffusée partout dans l’espace. Dans le Bouddhisme nous appelons cela «  l’océan de ce qui Est » le Dharmakaya. Et le Zen et la science reconnaissent également que l’observateur et la chose observée ne sont pas séparés mais bien pleinement entremêlés l’un à l’autre : Autrement dit, leur fonctionnement d’ondes qui s’empiètent l’une sur l’autre.

Mais tandis que l’esprit Zen reconnaît l’univers en tant qu’unité, la science en reste encore à lutter afin de pouvoir prouver qu’une telle condition pourrait exister – la quête de cette «  théorie de l’unification »  est une de celle qui va de l’avant ainsi depuis des dizaines d’années.

Ce n’est pas surprenant pour une personne Zen que les physiciens ressentent fortement qu’une telle condition unitaire de l’univers doit bien exister, pour nous aussi cela est évident. Ce sens de l’unité… l’Esprit Bouddhique … nous attire tous, pour autant que nous soyons réceptifs à celui-ci.  Je me pose quelque fois la question ; quelle pourrait être en mathématiques l’expression pour la condition de l’unité de l’univers – quelle est l’expression qui lierait ensemble toutes les forces, domaines et théories ? La seule réponse qui ait un sens à mon avis est « 0 » - zéro. Zéro est, et n’est pas. C’est un Tout, qui est pourtant contenu dans son vide. Il exprime le vide essentiel (à ne pas confondre avec la non-existence) de toutes choses. Etre vide dans ce sens là c’est, être fondamentalement dépourvu d’attributs car les attributs ne sont simplement que des manifestations du mental.   Si de brillants meta-physiciens en venaient à découvrir la «  Grande Théorie Unificatrice du Tout » dans la formule d’une équation, cette équation pourrait réduire dans sa forme simple 1=0 : ‘’1’’ est l’unité, ‘’0’’ est le vide. Etant équivalents, ils ne sont qu’une et même chose. Malheureusement la mathématique ne permet pas qu’une telle condition puisse exister (!).  Le plan physique ne peut être comprit complètement sans le plan spirituel.   Il n’y a que la  conscience propre qui puisse devenir attentive à cette unité universelle – La loi ou Dharma de l’Univers. Manquant de confiance dans la science il ne reste que l’enquête, l’esprit réflectif. La science – définie par la méthode scientifique même – est prudente  se concernant d’une seule manière pour entrevoir la réalité. Elle ne nous montre qu’une partie de la réalité – une partie du tout, une surface d’apparence –- sans nous montrer ce qu’il y a à l’intérieur. Trouver ce qu’il y a à l’intérieur est le but de toutes les questions spirituelles et du Zen, il en va de soi.   Lorsque nous trouverons ce qui est à l’intérieur cela pourra être une expérience de forte secousse. L’édifice entier de notre vie tombera en moreaux autant par la surprise de ce que nous trouverons que de s’apercevoir que la manière que nous avions employée pour voir cette réalité était tout à fait erronée et que l’état trouvé soit, ce qui ‘est’  réellement, sera totalement inimaginable. L’expérience apporte la réalisation directe de l’unité, de la non-différenciation et de l’harmonie accompagnée de joie et de paix qui ne peut être connue qu’une fois que la séparation entre soi et les autres aura disparu.   La science et le Zen sont-ils incompatibles? Pas du tout. Ils guident tout simplement l’enquêteur dans un champ différent de compréhension.  L’attention n’est-elle tout simplement que le résultat de nos neurones s’éteignant? Bien sur, mais là n’est pas la question. Le mystique dira que la perception de l’attention est de nature universelle qui n’est limitée à aucune pièce du ‘Tout’ ( réalité) mais provenant du ‘Tout’… de l’univers même.  La joie définitive fondamentale de la vie, d’être attentif, c’est la prise de conscience de la conjonction, de la ‘non-dualité’ et du ‘Tout’. Y a t’il une raison de s’engager dans un régime spirituel difficile si nous ne sommes que les parties d’un tout ? Nous ne sommes pas les parties d’un tout- ceci n’est qu’un truc de l’esprit. Les régimes spirituels ne font que soulever le rideau afin que nous puissions voir comment le truc a été fait.  Apprendre à connaître notre nature fondamentale dans le grand schème enrichit notre vie et nous raccorde à nous-même. Par ce raccord nous découvrons une grande joie ( et un soulagement aussi !) Celui de ne pas être des pièces isolées à la dérive dans un mélange tassé d’autres pièces.

Chaque sentiment de solitude, d’isolement ou de dépression disparaît parce qu’il ne prend racine que dans la création mentale (donc artificielle) de l’impression de séparation.  La science est comme le doigt qui montre la lune.

 

 Notre propre conscience est le moyen qui nous y conduit.